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Le joual, argot québécois très fleuri, fuse d'emblée en tirades incendiaires. Il est raccord avec le voltage anormalement élevé des situations. Quelque chose doit craquer. La beauté un peu désespérée du film tient, entre autres, aux efforts du trio principal pour retarder la déflagration fatale. Il y a la mère, veuve en pleine dégringolade sociale. Il y a le fils, 15 ans, déscolarisé, exubérant, violent, autodestructeur. Et leur nouvelle voisine d'en face, d'un milieu plus favorisé, mais qui a perdu ses mots et toute joie de vivre. Avec Mommy, Xavier Dolan passait plusieurs vitesses à la fois. L'émotion s'installe dans le premier tiers du film, sur un air de Céline Dion, et elle ne retombe plus. La prouesse tient d'abord aux actrices époustouflantes que sont Anne Dorval et Suzanne Clément. L'une et l'autre font penser à Gena Rowlands chez John Cassavetes (d'Une femme sous influence à Gloria), sans que la comparaison ne leur fasse d'ombre. Face à elles, le jeune Antoine-Olivier Pilon incarne, avec une fougue à tout casser, une figure nouvelle dans l'univers du cinéaste : un ado hétéro, à la fois taurillon agressif et agneau apeuré. A ses héros cabossés, comme à cette banlieue prolétaire de Montréal, Dolan donne un style rutilant. C'est le paradoxe d'un auteur nourri depuis l'enfance au cinéma hollywoodien (il ne jure que par Titanic), mais resté, pour l'instant, dans son jus québécois et dans l'économie de l'art et essai. Mommy est donc merveilleusement hybride : mi-naturaliste, mi-« bigger than life », tour à tour terre à terre et parcouru de somptueuses envolées lyriques.