Les monuments se caractérisent par une temporalité stratifiée et oxymorique : d’un côté, le passé se cristallise autour d’une image et devient mémoire ; de l’autre, on érige des monuments en envisageant un avenir sur lequel ils sont appelés à exercer leur influence. Sur les monuments, le temps laisse donc sa marque, son empreinte, la trace qui révèle un passage, un chemin, une rencontre qui vient du passé, se produit dans le présent et s’ouvre à l’avenir. Mais la trace et l’empreinte sont des indices qui témoignent d’une absence en même temps qu’ils la rendent présente : le cippe funéraire, la pierre tombale fichée en terre – voilà le degré zéro de la monumentalité, du geste du monere incarné dans un signe matériel qui rappelle et met en garde, qui joint le passé à l’avenir dans le présent. Cet ouvrage étudie la question de la monumentalité comme lieu de convergence entre certains axes polaires fondamentaux de l’expérience humaine (temps/espace, mémoire/oubli, présence/représentation, individu/ communauté, vie/mort) ; il est voué à étendre le concept de « monument » à l’image tout court et à explorer ses différentes nuances, en réunissant l’esthétique, la théorie de l’art, les visual studies et la philosophie morale et politique.