Extrait
Les PIES
Elles cassent les oreilles, on voudrait fuir. Les chiens leur aboient, les chiens n'aiment pas « de leur voir faire leur manège », rien n'y fait, elles se perchent sur le pommier devant la ferme, elles ne partiront que lorsqu'on aura pleuré. Une mauvaise nouvelle est en route. Les oiseaux sont rarement trompeurs. Rabiour est persuadé qu'ils ont une espèce de T.S.F. à eux pour les renseigner. Par trois fois la femme du garde est arrivée du bourg, porter des dépêches. Une porteuse ne doit pas dire ce que contient le papier, mais puisqu'elle l'a écrit sous la dictée du téléphone, ses voisins se chargent de la vulgarisation des secrets. Sans rien dire, on donne à comprendre. Il n'y a pas à être sorcier pour deviner le genre de littérature qu'elle transporte à travers la région. Les bonnes nouvelles lui donnent des jambes, les gens sont mieux disposés pour une annonciatrice de joie que pour une messagère de peine. Depuis qu'elle est facteur cette femme a grandi, elle a pris de l'expérience. Rabiour en la regardant passer est semblable aux oiseaux, une communication s'établit qui l'avertit de loin que cette fois-ci, le malheur est proche. Il arrête les ébats de César et de Papillon : « Le pauvre moussu, leur dit-il, on le verra plus ! » Souviens-toi, Papillon, que tu n'en as jamais vu un moins fier avec le monde. Un savant, c'était lui. Il était trop intelligent, trop amateur des livres, le savoir et la réflexion lui ont mangé sa vie. Celui que le malheur poursuit, il n'y a pas de grotte où il puisse se cacher, même en payant ».