On l'a appelé Le Luther Canadien, et en vérité ce titre n'apparaîtra pas usurpé à ceux qui liront ici son autobiographie. Né à Kamouraska au Québec, Charles Chiniquy (1809-1899) fut dans la première partie de sa vie un prêtre catholique extrêmement zélé, mais souvent désemparé par la corruption de ses supérieurs hiérarchiques, et attristé par leur hostilité envers la lecture de la Bible. Orateur charismatique et puissant, il acquit dans son pays une grande notoriété dans sa lutte contre l'alcoolisme, qui ravageait alors le peuple canadien. Sur l'appel de l'évêque de Chicago il émigrera ensuite vers les plaines fertiles de l'Illinois pour y fonder Sainte-Anne, une colonie destinée à accueillir ses compatriotes miséreux. C'est là que constamment en butte à l'opposition de son Église, qui lui interdisait de promouvoir la lecture des Écritures chez les laïques, il finira par rompre avec Rome, et par se déclarer Protestant. Proportionnelle à sa réputation, la secousse de sa conversion agita longtemps l'opinion publique ; d'autant que dans ses livres Chiniquy dévoilait les turpitudes des prêtres catholiques, en particulier les questions scandaleuses qu'ils s'étaient engagés à poser aux femmes mariées, dans le confessionnal, et les conséquences désastreuses qui résultaient de leur voyeurisme. Paru premièrement en français en 1885, cet ouvrage en deux volumes eut beaucoup moins de succès que sa version anglaise ; il fut néanmoins partiellement réédité au vingtième siècle par des éditeurs francophones. Voici donc dans son entier ce pavé du patrimoine polémique évangélique ; son Appendice n'en est pas la partie la moins intéressante, puisqu'on y apprend le rôle des Jésuites dans la guerre de Sécession, et dans l'assassinat d'Abraham Lincoln, ami personnel de Charles Chiniquy.