Le « buscón », gueux-aventurier-vagabond, est un fils de coquin, coquin lui-même et frotté à plus coquin que lui, qui va tenter de se faire une place dans la cité. Quevedo nous décrit les mésaventures souvent cruelles, toujours cocasses, de ce garçon confronté aux impossibilités d’une ascension sociale. Ce faisant, l’auteur nous dévoile comment, dans une Espagne surendettée où le Roi lui-même fait banqueroute, la hiérarchie des ordres commence à le céder aux rapports de classe. L’unique noblesse, désormais, est celle que procure « Don Dinero », c’est-à-dire l’Argent.
Représentation de la société urbaine du Siècle d’or à travers une satire corrosive, La Vie du truand don Pablos de Ségovie, vagabond exemplaire et modèle des filous ne met cependant à mal ni la manière dont le pays est gouverné ni l’omniprésence de l’Inquisition. Décapante par son humour noir et sa scatologie, cette sorte de bande dessinée de l’époque reprend les situations et les modèles en vogue dans la littérature pour les caricaturer jusqu’à l’extrême. D’où le jeu langagier qui s’installe dès les premières lignes, mots d’esprit, calembours, homonymies, associations de signes ou d’idées qui, souvent font rire aux éclats.